Asako I & II

de Ryusuke Hamaguchi

Amoureux. Quand Asako voit subitement s’envoler son premier grand amour, Baku, elle a l’impression que le monde s’effondre. Elle part d’Osaka pour tout recommencer à zéro. Désormais installée à Tokyo elle finit par tomber amoureuse de Ryohei, qui est le sosie de l’homme qu’elle a aimé deux ans auparavant. Le réalisateur de l’excellent Senses (2018), Ryusuke Hamaguchi, livre ici un portrait de femme puissant et subtil. L’étrangeté de certaines scènes, la multiplication de différents niveaux de réalité, la part de rêve, et même de fantastique, font d’Asako I & II un très grand film sur les sentiments amoureux.

Asako I & II de Ryusuke Hamaguchi, avec Masahiro Higashide, Erika Karata, Koji Seto (JAP, 2018, 1h59), 19,99 euros (DVD seulement, pas de sortie blu-ray).

Happy Birthdead 2 You

de Christopher Landon

Parallèle. Tree pensait vraiment que le calme allait revenir dans sa vie. Très amoureuse de Carter, elle se retrouve soudain dans une dimension parallèle, dans laquelle tout le monde, ou à peu près, veut sa peau. Le premier opus jouait sur la répétition : coincée dans une boucle temporelle, l’héroïne revivait sans cesse la même journée et finissait invariablement assassinée, jusqu’à ce qu’elle parvienne à comprendre ce qui se tramait. Faire une suite à un film construit sur la notion de répétitivité semblait logique. Forcément, l’effet de surprise n’est plus là, mais l’humour et l’énergie de Jessica Rothe sauvent Happy Birthdead 2 You du naufrage total.

Happy Birthdead 2 You de Christopher Landon, avec Jessica Rothe, Israel Broussard, Phi Vu (USA, 2019, 1h40), 14,99 euros (DVD), 16,99 euros (blu-ray).

Deux Fils

de Félix Moati

Faiblesses. Le jeune Ivan, un collégien, n’apprécie pas de voir son père, Joseph, et son frère, Joachim s’effondrer. Alors que son père s’était imposé comme médecin, il a décidé de tout plaquer pour se lancer, sans succès, dans une carrière d’écrivain. Quant à son frère, Joachim, il ne se remet pas de sa dernière rupture amoureuse, au risque d’échouer dans ses études de psychiatrie. Félix Moati, dont c’est le premier long métrage en tant que réalisateur, propose une comédie dramatique très réussie. Rythmé, Deux Fils détaille les manques, les faiblesses et les fêlures de cette famille, brillamment portée par l’excellente interprétation de Benoît Poelvoorde, Vincent Lacoste et Mathieu Capella.

Deux Fils de Félix Moati, avec Vincent Lacoste, Benoît Poelvoorde, Mathieu Capella (FRA, 2019, 1h30), 19,99 euros (DVD), 19,99 euros (blu-ray).

Celle quevous croyez

de Safy Nebbou

“Fake”. C’est un peu telle est prise qui croyait prendre. Pour piéger Ludo, son amant, Claire, 50 ans, devient sur les réseaux sociaux Clara, une superbe jeune femme. Mais c’est Alex, l’ami de Ludo, qui craque pour elle. Peu à peu, Claire finit à son tour par tomber amoureuse d’Alex. Adapté d’un roman de Camille Laurens publié en 2016, Celle que vous croyez verse aussi dans le thriller, et multiplie les rebondissements. Le face à face Juliette Binoche — Nicole Garcia tient toutes ses promesses. Le film de Safy Nebbou questionne aussi notre époque, portée par un désir de transparence, mais qui voit les “fake” en tout genres se démultiplier.

Celle que vous croyez de Safy Nebbou avec Juliette Binoche, François Civil, Nicole Garcia (FRA, 2019, 1h42), 19,99 euros (DVD), 19,99 euros (blu-ray). Sortie le 2 juillet.

Et c’est comme ça qu’on a décidé de tuer mon oncle

de Rohan O’Grady

Île. Quand on a 12 ans et que l’on est l’héritier d’une énorme fortune, il faut être sur ses gardes. Surtout si on découvre que son oncle est bien décidé à tout faire pour vous tuer, afin de mettre la main sur l’argent. Publié pour la première fois en 1963 sous le titre Let’s Kill Uncle, ce livre met en scène la réaction de ce jeune garçon, Barnaby Gaunt, qui fait appel à sa copine, Christie, pour prendre son oncle à son propre piège. Rohan O’Grady (1922-2014), de son vrai nom June Margaret O’Grady, nous plonge dans un récit où l’humour noir a des relents d’Edgar Allan Poe (1809-1849). Ce récit initiatique qui se déroule sur un île au large de la Colombie Britannique est un véritable délice.

Et c’est comme ça qu’on a décidé de tuer mon oncle de Rohan O’Grady (Monsieur Toussaint Louverture), 304 pages, 17,50 euros.

Dracula et autres récits vampiriques

Collectif

Enfin. Il était temps. Dracula (1897) de Bram Stoker (1847-1912) vient de faire son entrée en Pléiade. Une nouvelle qui fait suite à la publication, dans la même collection, de Frankenstein et autres romans gothiques (2014), et qui vient confirmer, si besoin était, que le genre fantastique n’est pas mineur et que son contenu est toujours valide, aujourd’hui encore. Dans son introduction, Alain Morvan, nous rappelle que la figure du vampire n’a jamais été aussi actuelle. Outre Dracula, on lira Le Vampire de Polidori, Christabel de Coleridge, Carmilla de Le Fanu ou encore Fragment de Lord Byron. On ne ratera pas non plus, enfin traduit, Le Sang du vampire, un très bon roman de Florence Marryat (1833-1899).

Dracula et autres récits vampiriques, Collectif (textes traduits, présentés et annotés par Alain Morvan), (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard), 1 168 pages, 63 euros (prix de lancement, jusqu’au 31 décembre 2019).

La petite fille que j’ai tuée

de Ryô Hara

Violoniste. Né en 1946, Ryô Hara est un écrivain japonais qui a eu plusieurs vies. En effet, avant de se mettre à écrire, il a tour à tour été pianiste dans un groupe de jazz, avant de devenir patron d’un night-club. Pas tout à fait étonnant donc que de cet univers nocturne soit né une série de romans noirs, dans lesquels on pourrait reconnaître la patte de Raymond Chandler (1888-1959). Initialement publié en 1989 sous le titre La fille que j’ai tuée, ce livre raconte l’histoire de Sawasaki, détective pour l’agence Watanabe. Alors que son patron est parti avec de l’argent qui est la propriété de yakuzas, Sawazaki est contacté par des malfrats qui ont enlevé une fillette, qui est une violoniste de classe internationale. Mais au moment où il s’apprête à donner aux ravisseurs une mallette avec 6 millions de yens, deux motards s’en emparent. Très rythmé, ce polar noir se lit d’une traite.

La petite fille que j’ai tuée de Ryô Hara (Atelier Akatombo), 378 pages, 18 euros. Sortie le 20 juin 2019.

Saisons des Roses

de Chloé Wary

Femmes. Jusqu’au 7 juillet, on va parler de football féminin (lire notre dossier complet sur le sport et le sexisme publié dans Monaco Hebdo n° 1109). Et après ? Que va-t-il se passer ? Le football féminin va-t-il retomber dans le quasi-anonymat dans lequel il est plongé ? Dans Saison des Roses, Chloé Wary raconte la lutte d’une bande de filles pour s’imposer dans le monde du football. Capitaine de l’équipe des Roses de Rosigny, Barbara a un rêve : devenir professionnelle. Elle-même joueuse dans une équipe féminine de l’Essonne, le FC Wissous, Chloé Wary possède la vision et le vécu nécessaire pour traiter avec précision et réalisme le quotidien de ce groupe de femmes. Saison des Roses est une BD aussi passionnante que nécessaire, alors que, peu à peu, le regard sur les femmes commence enfin à changer.

Saison des Roses de Chloé Wary (Editions FLBLB), 240 pages, 23 euros.

Paresse

de Pascal Girard

Strip. Ceux qui l’avaient raté n’auront plus aucune excuse. La Pastèque a eu l’excellente idée de rééditer, dans un nouveau format et avec une nouvelle couverture, le tout premier livre de Pascal Girard. La Paresse a d’abord pris vie sur internet. En 2008, chaque jour, Pascal Girard a publié pendant 6 mois un strip. En seulement quatre cases, avec un trait simple et en noir et blanc, Pascal Girard parvient à être d’une redoutable efficacité. Souvent drôle, il se moque avec habileté des travers de notre société. Né en 1981 au Québec, à Jonquière, Pascal Girard ne fait pas que des BD, puisqu’il est également travailleur social à la clinique des troubles du mouvement du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) de Montréal. Il n’hésite d’ailleurs pas à se mettre en scène, en train de chercher l’inspiration, parfois aidé par son chat de façon surprenante. Il faudra lire cette BD pour savoir pourquoi.

Paresse de Pascal Girard (La Pastèque), 80 pages, 14 euros.

A Bath Full of Ecstasy

Hot Chip

Voyage. Il suffit d’écouter Hungry Child pour comprendre. Le décor est posé et, 9 titres durant, Hot Chip ne quittera pas cette tonalité très “rave”, et nous, le dance-floor qui va avec. Dix-neuf ans après leurs débuts, ce groupe londonien n’a rien perdu de son efficacité. Toujours porté par les membres fondateurs que sont Alexis Taylor et Joe Goddard, ce 7ème album est une ode à la fête, à la transe et aux clubs. En 9 titres, Hot Chip dynamite à peu près tout, et A Bath Full of Ecstasy ne relâche jamais la pression. Pour la première fois, ce groupe britannique a fait appel à à deux producteurs. Philippe Zdar (Phoenix, Cassius), mort accidentellement le 19 juin 2019 à l’âge de 52 ans, et Rodaidh Mcdonald (The Xx, David Byrne). Le titre d’ouverture, Melody of Love, construit sur un sample du groupe de gospel américain des années 1960, Mighty Clouds of Joy, est un titre parfait pour entamer ce voyage que l’on voudrait ne jamais voir finir.

A Bath Full of Ecstasy, Hot Chip (Domino), 22,99 euros (doule vinyle exclusivité Fnac), 14,99 euros (CD).

Lust for Youth

Lust for Youth

Lumineuse. Composé de Hannes Norrvide et de Malthe Fischer, le duo norvégien Lust for Youth est de retour avec un disque qui ne décevra pas les fans de la première heure. Toujours très marquée cold-wave, et portée par la voix de Hannes Norrvide depuis leur premier album Solar Flare (2011), cette nouvelle production lorgne très franchement vers le son de New Order. On note aussi la présence de la jolie voix de la musicienne danoise Soho Rezanejad sur le titre Fifth Terrace, une belle balade qui fonctionne plutôt bien. Globalement, la synth-pop mélancolique de ce duo est un peu plus lumineuse que d’habitude, notamment sur Great Concerns. Une tendance confirmée dès l’ouverture de ce disque éponyme, assurée par un New Balance Point plus pop que triste. De là à penser que le duo pourrait délaisser la cold-wave pour son prochain album, il n’y a qu’un pas. Le franchiront-ils ?

Lust for Youth, Lust for Youth (Sacred Bones Records), 14,90 euros (CD).

Loom Dream

Leif

Ambient. A l’écoute de Loom Dream, on se dit que, parfois, prendre du temps a du bon. S’asseoir, se relaxer et prendre le temps de se plonger dans cette ambiance évanescente, planante et d’une incroyable richesse sonore, c’est le programme proposé par Loof Dream. Depuis le début des années 2 000, la musique du producteur et DJ gallois, Leif Knowles, évolue. Pour ce troisième album, il délaisse la minimal house qu’il a chérie à ses débuts, pour nous livrer en 6 titres 34 minutes d’ambient, que l’ont pourrait qualifier de très bucolique. A commencer par Mimosa, un titre qui débute avec le chant des oiseaux pour se poursuivre par des nappes électroniques planantes. Borago, Myrtus, Rosa… Les titres s’enchaînent, créant une atmosphère de douce sérénité, à laquelle il serait dommage de ne pas s’abandonner.

Loom Dream, Leif (Whities), 7 euros (en MP3 ou FLAC sur Bandcamp), 17 euros (vinyle).