vendredi 19 avril 2024
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Jean Todt : « L’insécurité routière est un des plus grands fléaux dans le monde »

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Du 5 au 8 juillet 2021 s’est tenue à Monaco la conférence annuelle de la Fédération internationale de l’automobile. L’occasion pour Monaco Hebdo d’aller à la rencontre du patron du sport automobile mondial, Jean Todt. Interview.

Quels sont les grands axes de cette conférence FIA 2021 ?

Cette conférence, c’est déjà l’opportunité de rassembler une grande partie des membres de la FIA [clubs et fédérations automobiles – NDLR], car nous ne nous sommes plus revus depuis décembre 2019, lors de l’assemblée générale à Paris. Et le but, c’est d’avoir le conseil mondial mobilité qui vient de se terminer, le conseil mondial du sport automobile et des conférences… Donc d’évoquer beaucoup d’initiatives pour parler du futur de nos championnats, du futur de l’environnement dans le domaine de la mobilité automobile, ou encore de la sécurité routière.

Comment rendre le sport automobile plus respectueux de l’environnement ?

En Formule 1, il y a depuis 2014 un moteur hybride, donc nous avions été visionnaires. Nous sommes en train de travailler sur une nouvelle motorisation à partir de 2025-2026. Et nous voulons aussi introduire le plus vite possible ce qu’on appelle du « green fuel », c’est-à-dire de l’essence neutre en carbone. Nous travaillons donc avec les constructeurs, avec les pétroliers pour aller dans le sens du zéro pollution, mais également du zéro accident sur les routes qui est un autre de nos engagements.

L’empreinte carbone de la Formule 1 reste malgré tout très élevée, notamment pour des raisons logistiques (fret aérien, maritime et routier pour transporter les équipements…) : comment comptez-vous lutter contre ça ?

Il est vrai que nous devons être une vitrine. Nous devons être un laboratoire. Dans d’autres disciplines comme la Formule E, nous avons été pionniers avec une discipline de monoplaces électriques dans les villes. Monaco a d’ailleurs accueilli cette année ce championnat. Je ne dis pas que tout le travail a été fait, mais en tout cas nous sommes en marche pour faire le travail qui doit être fait.

La Formule E peut-elle à terme supplanter la Formule 1 ?

Non, absolument pas. Ce sont deux disciplines fondamentalement différentes. La Formule E se déroule dans les villes avec des voitures exclusivement électriques, avec des courses qui durent environ 40 minutes. Alors que la Formule 1 se déroule sur des circuits adaptés compte tenu des vitesses, des temps au tour différents… Ce sont donc deux disciplines fondamentalement différentes, mais très complémentaires.

La sécurité routière est un thème qui vous tient particulièrement à cœur. Vous avez d’ailleurs écrit un livre à ce sujet (1) : quel rôle peut jouer la FIA ?

L’insécurité routière est un des plus grands fléaux dans le monde : 1,4 million de morts sur les routes tous les ans, entre 30 et 50 millions de blessés avec des séquelles et des handicaps. C’est le fléau numéro 1 pour les jeunes entre 5 et 29 ans. Quatre-vingt-dix pour cent de ces chiffres ont lieu dans des pays en voie de développement, donc nous avons beaucoup de programmes d’engagés, et la FIA est très engagée avec ses membres. Moi-même, je suis depuis 2015 l’envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la sécurité routière dans le monde. Je travaille donc avec les gouvernements, avec les instances internationales de manière à ce que cette pandémie soit mise parmi les priorités de la planète.

Vous êtes soutenu par la princesse Charlène et Charles Leclerc dans ce combat ?

Oui, tout à fait. Nous bénéficions du soutien de personnalités, grâce notamment à la campagne qui a été faite par JC Decaux, qui est le numéro 1 en matière d’affichage dans le monde. Et nous avons des ambassadeurs comme la princesse Charlène, Charles Leclerc, Rafael Nadal, Fernando Alonso, Felipe Massa… Une vingtaine d’ambassadeurs nous soutiennent, et cette campagne a été diffusée dans plus de 1 000 villes et 80 pays.

L’un des thèmes abordés au cours de cette conférence concerne la place des femmes dans le sport automobile : pourquoi les femmes ont-elles du mal à s’imposer ?

Historiquement, la compétition automobile est plus un sport masculin. Mais nous avons créé une commission sportive présidée par Michèle Mouton, à travers laquelle nous voulons favoriser l’accès aux femmes. Et c’est en train de très bien se développer.

Vous avez enfin révélé au cours de cette conférence les résultats d’un rapport sur l’impact économique et social du sport automobile : quelles en sont les conclusions ?

La compétition automobile dans le monde génère un chiffre d’affaires d’environ 160 milliards d’euros et environ 1,5 million d’emplois chaque année. C’est absolument énorme, et je pense que l’on peut faire beaucoup mieux. C’est dans cette voie que nous sommes engagés.

1) Des millions de vies à sauver… sur les routes du monde,

Jean Todt (éditions Débats Publics) 182 pages, 18 euros.