dimanche 2 avril 2023
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Éric Cancemi et Julien Trocello : « Sur l’Aconcagua, nous avons touché ce qu’est l’expédition polaire »

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Tout juste revenus d’Argentine, Éric Cancemi et Julien Trocello ont accepté de raconter à Monaco Hebdo leur ascension de l’Aconcagua, point culminant de la Cordillère des Andes, situé à 6 962 mètres d’altitude. Un récit vertigineux.

Comment est né ce projet d’ascension de l’Aconcagua ?

Éric Cancemi : C’est un projet qui a mûri dans la tête de plusieurs personnes, car nous étions six à partir. Nous sommes un groupe d’amis de longue date, qui partageons la passion du sport. Nous avons d’abord fait quelques sommets ensemble dans la région. Et de fil en aiguille, nous nous sommes fixés de gravir les plus hauts sommets du monde pour faire connaître notre association, le Wolf Pack Sports Team, dont l’objectif est de faire partager le sport au plus grand nombre et aider les personnes handicapées. Le projet est né de cette manière.

Comment se prépare-t-on à une telle ascension ?

Éric Cancemi : On se prépare en faisant du sport toute l’année. En été, on monte dans les Alpes, on fait pas mal de 4 000 mètres. Nous sommes tous sportifs à la base, donc on s’entraîne régulièrement toute l’année.

Wolf Pack Sports Team Eric Cancemi Julien Trocello
© Photo Wolf Pack Sports Team

Pourquoi avoir choisi de gravir l’Aconcagua ?

Julien Trocello : Pour nous, c’était la suite logique après avoir fait le Kilimandjaro [en octobre 2021 – NDLR]. Sur le papier l’Aconcagua, c’est un Kilimandjaro « plus-plus ». Dans la réalité, ça s’est avéré beaucoup plus compliqué encore [rires]. Mais on reste sur une forme de trek, qui ne nécessite pas d’appliquer des techniques alpines avancées ce qui représente une difficulté particulière. Faire de la varappe [technique d’escalade le long d’une paroi – NDLR], passer des relais à plus de 6 000 mètres, c’est compliqué. Cette ascension ne le nécessitait pas. Nous voulions par ailleurs gravir un sommet plus haut que le Kilimandjaro, mais sans se mettre cette difficulté technique.

« On se prépare en faisant du sport toute l’année. En été, on monte dans les Alpes, on fait pas mal de 4 000 mètres. Nous sommes tous sportifs à la base, donc on s’entraîne régulièrement toute l’année » 

Eric Cancemi

Quelle différence y a-t-il entre l’Aconcagua et le Kilimandjaro ?

Julien Trocello : C’est assez similaire. Malgré tout, sur la partie sommitale, ça faisait 20 ans que l’Aconcagua n’avait pas été aussi enneigé. Il a donc fallu chausser des crampons, ce que nous n’avions pas eu à faire sur le Kilimandjaro [le Kilimandjaro culmine à 5 895 mètres — NDLR], car nous avons toujours marché sur du sentier. La différence, au-delà de l’altitude, c’est donc que la montagne était enneigée, donc il fallait se cramponner, parfois s’encorder et utiliser des piolets sur la partie finale. L’ascension de l’Aconcagua était finalement plus technique que le Kilimandjaro.

Combien de temps faut-il pour monter un tel projet ?

Julien Trocello : Nous avons initié ce projet d’ascension dans l’avion, au retour du Kilimandjaro. Mais nous l’avons vraiment appuyé six mois avant, sur le “booking” [la réservation — NDLR] des guides. Nous avions déjà réservé les billets d’avion 9 mois avant… Il nous a donc fallu une petite année pour mettre tout ça en place. Sachant que le dernier mois a nécessité pas mal d’investissement en termes de temps pour mobiliser les gens autour de nous et organiser les derniers préparatifs en termes d’équipement notamment.

Quel était votre budget ?

Julien Trocello : Si on donne un budget global (voyage, équipement, guides, nourriture, hôtels, vols intérieurs…), il faut compter environ 15 000 euros par personne. L’idée était donc de trouver des sponsors pour compenser une certaine partie, que ce soit de manière financière ou en matériel.

Wolf Pack Sports Team
© Photo Wolf Pack Sports Team

Vous avez réussi à mobiliser des partenaires ?

Éric Cancemi : Oui, beaucoup de partenaires nous ont aidés, et nous aident encore à nous faire connaître, car le but de l’ascension était de faire connaître l’association. Grâce à eux, le Wolf Pack Sports Team s’est vu éclore un peu plus pendant l’ascension parce que nous avons vu l’engouement des membres. Nous avons eu beaucoup de demandes sur l’alpinisme, sur la montagne, sur le trekking. Les gens cherchent de plus en plus à partir à l’aventure, pas forcément très haut mais déjà à sortir de leur zone de confort pour aller découvrir quelque chose qu’ils ne connaissent pas.

« La différence, au-delà de l’altitude, c’est que la montagne était enneigée, donc il fallait se cramponner, parfois s’encorder et utiliser des piolets sur la partie finale. L’ascension de l’Aconcagua était finalement plus technique que le Kilimandjaro »

Julien Trocello

Quelles ont été les grandes étapes de votre ascension ?

Julien Trocello : Quand nous sommes arrivés en Argentine, nous nous sommes d’abord déplacés au point de départ, à Mendoza. Le principe sur tout le trek, c’était de faire une traversée. On passait par une vallée, on allait toucher le sommet et on redescendait par une vallée différente. Et à chaque étape, on avait soit des mules, soit des porteurs une fois que nous étions en altitude, qui prenaient nos affaires pour les amener au camp suivant. Et nous, nous faisions la marche avec nos guides et notre sac de la journée qui contenait un peu d’eau, de la nourriture et quelques équipements. Nous avons avancé comme cela de camp en camp. Et, à partir du moment où nous sommes arrivés au camp de base, le quatrième jour, nous avons commencé à nous acclimater.

C’est-à-dire ?

Julien Trocello : Nous montions en altitude pour essayer de « choquer » notre corps et nous redescendions. Le corps ayant vécu des conditions de stress, il tente de s’adapter. En l’occurrence, il s’adapte à l’altitude en produisant des globules rouges et quand on retourne à cette altitude, normalement le corps est mieux préparé et à ce moment-là, on peut résister et vivre correctement. À chaque fois que nous passions d’un camp à l’autre, nous avons fait cette technique où l’on montait et redescendait pour acclimater notre corps.

Wolf Pack Sports Team
© Photo Wolf Pack Sports Team

Fallait-il prendre les mêmes précautions pour la descente ?

Julien Trocello : Non, on pouvait y aller plein pot. Plus on va vite en redescendant, plus on retrouve de l’oxygène et mieux on se sent. Quand on est descendu au camp de base le quatorzième jour, à la fin on courrait presque car on se sentait bien et on savait que c’était terminé.

Éric Cancemi : Il y a un peu une sensation d’euphorie avec l’apport en oxygène, qui efface complètement la fatigue. Ça permet d’arriver encore plus vite en bas car il y a aussi un certain ras-le-bol après deux semaines de contrainte, de conditions précaires et de conditions météo difficiles.

Quelles étaient les conditions au sommet ?

Julien Trocello : C’était de pire en pire [rires]. Les premiers jours, nous étions un peu dans l’excitation. Nous dormions et mangions dans des dômes tous ensemble. Les conditions étaient un peu spartiates mais c’était encore bon enfant. Nous sommes ensuite arrivés au camp de base, où nous avions plus de confort. Nous avions un dôme dortoir et un dôme pour manger, partager, discuter, avec la douche et de vraies toilettes. En revanche, dès que nous avons rejoint le camp suivant, à partir de 5 000 mètres, et 6 000 mètres au camp 3, il y a de la neige, il fait froid, il y a du vent. Nous dormions à deux dans la tente, il n’y avait plus vraiment de lieu pour se réunir.

Éric Cancemi : Nous nous sommes retrouvés en binôme, ce qui a changé notre expérience. Puisque d’une aventure à 6, c’est devenu une aventure à deux. C’était très sympa mais ça change l’aspect soutien. Le côté communauté s’est un peu effiloché.

Julien Trocello : Nous nous n’y attendions pas. Nous étions persuadés de retrouver les mêmes conditions que sur le Kilimandjaro, où nous étions restés à six du début à la fin. Sur l’Aconcagua, nous avons touché ce qu’est l’expédition polaire où tout devient plus compliqué : les besoins, l’alimentation…

« Nous montions en altitude pour essayer de « choquer » notre corps et nous redescendions. Le corps ayant vécu des conditions de stress, il tente de s’adapter » 

Julien Trocello

Comment vous alimentiez-vous ?

Éric Cancemi : L’alimentation a été compliquée pour moi. Parce que je mange beaucoup et je brûle énormément. C’était spartiate et limité car nous sommes partis en autonomie avec les guides et il fallait se rationner.

Julien Trocello : Surtout au point final, où on approche du dénouement. Il nous a manqué un peu de nourriture pour remplir les estomacs et avoir vraiment l’énergie nécessaire. Certains n’ont pas bien mangé et cela leur a porté préjudice. Les conditions pratiques de vie étaient très compliquées et les conditions sociales se sont dégradées par la force des choses.

Wolf Pack Sports Team
© Photo Wolf Pack Sports Team

Et les conditions météo ?

Julien Trocello : Les conditions météo étaient extrêmes parce que la montagne n’avait pas été aussi enneigée depuis 20 ans. C’était devenu un congélateur. Il faisait très froid, -15 à -20 °C. Et quand on a pris une tempête de vent, ce qui nous a d’ailleurs obligés à repousser l’ascension finale de deux jours, il y avait des rafales à 80 km/h et nous nous sommes pris du – 30/- 35 °C. C’est dur car on ne peut même pas se mettre dehors en journée. On n’arrivait pas à discuter, ni à s’entendre tellement il faisait froid. Le vent rentrait de partout, c’était vraiment pénible. Nous étions bloqués, avec notre binôme, dans les tentes. À la fin, on avait qu’une envie c’est que ça se termine.

Le mental est très important dans ces moments-là ?

Éric Cancemi : Oui, psychologiquement nous étions tous prêts à aller au bout. Mais c’est vraiment le corps qui a décidé d’arrêter certains d’entre nous. Un de nos amis a fait demi-tour et il ne s’en rappelle même pas.

Combien ont atteint le sommet ?

Éric Cancemi : Trois sur six ont atteint le sommet. Moi, j’ai abandonné le premier, à 6 000 mètres car j’ai souffert du mal des montagnes. J’ai été pris de migraines en redescendant de l’acclimatation. J’ai passé 36 heures avec une migraine très violente, je me suis déshydraté, car je ne bougeais plus et je ne buvais plus. Mon taux de saturation d’oxygène est descendu. Le guide a pris la décision de me faire redescendre à 5 500 mètres pour me faire examiner et bien lui en a pris, sinon j’y serais resté. En fait, j’avais de l’eau dans les poumons. Jérémy qui a fait 300 mètres de plus (que moi) a dû arrêter aussi. Et Nicolas a dû renoncer à 160 mètres du sommet, c’est-à-dire 2 h 30 de marche supplémentaire.

« Trois sur six ont atteint le sommet. Moi, j’ai abandonné le premier, à 6 000 mètres, car j’ai souffert du mal des montagnes. J’ai été pris de migraines en redescendant de l’acclimatation »

Eric Cancemi

Comment avez-vous vécu cet abandon forcé ?

Éric Cancemi : C’est bien la première fois que je ne le vis pas comme un abandon, parce que j’ai été au bout de moi-même, et je n’en pouvais plus. J’avais besoin d’arrêter parce que sinon j’y restais. Je me sentais hyper-faible, j’avais mal à la tête et je voyais bien que je n’étais plus maître de moi-même. Le guide a pris la bonne décision au moment parfait et je ne l’ai pas discutée. Je ne regrette pas, j’ai fait ce que j’avais à faire, et mon corps a dit stop ce qui ne m’empêchera pas de recommencer. J’ai déjà envie de repartir. Je vais me préparer un peu plus à l’acclimatation, je vais peut-être m’équiper différemment, je vais m’adapter.

Aconcagua Summit
© Photo Wolf Pack Sports Team

Julien, vous avez vous atteint le sommet de l’Aconcagua : qu’avez-vous ressenti, à ce moment-là ?

Julien Trocello : C’est beaucoup de fierté. Mais pas une fierté propre, c’est la fierté d’arriver à porter les valeurs de notre association au sommet avec le travail du groupe. En fait, c’est de la satisfaction, de l’accomplissement. On prépare cette ascension depuis des mois, on a passé deux semaines dans le dur, dans la souffrance et atteindre le sommet, c’est l’accomplissement de tous ces efforts. Je l’ai extériorisé par des pleurs et ensuite, je me suis calmé, j’ai admiré le paysage et j’ai pensé aux copains, à tout ce que l’on avait fait et vécu. C’est difficile de qualifier ce moment-là car c’est un mélange de sensations et d’émotions.

Combien de temps êtes-vous resté au sommet ?

Julien Trocello : Nous avons mis 8 h 40 pour arriver au sommet en parcourant environ 1 000 mètres de dénivelé positif. Ce qui est un bon temps car d’habitude, il faut compter plutôt 11 heures. Nous sommes montés comme des fusées même si nous avions l’impression d’aller doucement. Quand on passe les 6 000 mètres d’altitude, on parcourt plus ou moins 100 mètres à l’heure en dénivelé. Nous sommes restés environ 30 minutes au sommet, ce qui est beaucoup parce qu’en général on passe 5-10 minutes et on redescend. Mais on se sentait bien, on a voulu faire pas mal de photos et profiter du moment.

Vous avez pourtant dû patienter quelques jours avant de réaliser l’ascension finale ?

Julien Trocello : Initialement, nous avions planifié notre trek sur treize jours. Nous avions prévu de faire l’ascension finale le 26 janvier 2023 mais une tempête est arrivée pile à ce moment-là. Il a fallu du coup s’adapter. Nous avons rajouté un jour de repos au camp de base et un jour de repos au camp 2. Et nous avons finalement décalé l’ascension au 28 janvier pour avoir des conditions à peu près correctes.

Quelle était l’ambiance dans les camps ?

Éric Cancemi : Comme nous ne sommes pas passés par la voie classique, nous avons eu la chance de ne pas rencontrer beaucoup de monde. Il y avait quelques groupes, mais pas trop. À cause de la tempête, toutes les expéditions se sont réunies au camp 2 donc il y avait plus de monde.

Julien Trocello : Tout le monde attendait les mêmes créneaux que nous donc ça a concentré les expéditions. Dans notre voie, nous nous sommes retrouvés à une dizaine d’expéditions de différentes tailles. Ce qui représente une centaine de personnes.

Éric Cancemi : On ne peut pas dire qu’on a parlé à beaucoup de monde car on avait déjà du mal à parler entre nous en raison du froid. Mais ça se passe bien dans les camps, on est tous amoureux de la montagne donc il y a toujours une bonne ambiance.

À la base, vous aviez un autre projet en tête pour cette ascension ?

Julien Trocello : Oui, à la base on voulait emprunter la voie des Polonais. C’était le même trek sauf qu’au lieu de passer par le sentier, on devait traverser un glacier pour atteindre le sommet. C’était 1 000 mètres de dénivelé positif dans la glace à 60-70 degrés, encordés, crampons et piolet. Dès le début, des copains ont préféré opter pour la voie classique donc nous nous sommes organisés pour qu’il y ait deux expéditions le jour du sommet : une voie normale et une par le glacier. Mais au fur et à mesure qu’on s’approchait du glacier, après avoir étudié son état, les conditions météo, la fatigue qu’on ressentait sur le moment, nous avons finalement décidé d’abandonner cette voie qui était trop technique et trop difficile. Nous avons d’ailleurs croisé la star mondiale de la varappe, Alex Honnold, qui a lui aussi renoncé. La raison l’a emporté et bien nous en a pris, parce que nous en avons déjà beaucoup bavé sur la voie normale.

Comment avez-vous géré le manque d’oxygène ?

Julien Trocello : Il n’y a pas cinquante solutions pour gérer le manque d’oxygène en altitude. Quand on est en mouvement, il faut s’économiser au maximum, faire les choses doucement et prendre son temps pour éviter de faire monter le cardio. Du coup, en ayant un rythme peu soutenu, minimaliste, on arrive à avancer. Quand on grimpe en altitude, il n’y a plus de sprint, on est sur de l’endurance. On se met donc bas régime et on avance petits pas par petits pas. Ensuite, pour pouvoir s’acclimater, on faisait des allers-retours avec des altitudes supérieures pour « choquer » notre corps afin qu’il s’habitue. Car on perd 10 % de taux d’oxygène tous les 1 000 mètres qu’on va gravir. Comme nous sommes montés jusqu’à 7 000 mètres d’altitude, nous étions théoriquement à 40 % de taux d’oxygène.

Vous aviez des bouteilles d’oxygène ?

Éric Cancemi : Non, nous n’avions pas de bouteille d’oxygène car à cette altitude, elles sont trop lourdes. En cas de secours, les guides avaient des seringues qui remplacent les bouteilles d’oxygène. Ça prend moins de place et c’est tout aussi efficace.

Julien Trocello : En fait, il s’agit d’un stimulant qui va ouvrir les voies respiratoires. En respirant mieux, on fixe plus d’oxygène donc le corps fonctionne mieux. Certaines expéditions avaient des bouteilles d’oxygène en secours. Mais ils étaient plus nombreux.

Êtes-vous surpris par la capacité du corps à s’adapter face à de telles conditions ?

Éric Cancemi : J’ai une autre expérience car je ne suis pas arrivé au sommet mais j’ai l’impression que tous les facteurs doivent être pris en compte pour avoir le résultat final de l’organisme. C’est-à-dire qu’on peut être bien un jour et très mal le lendemain, au même endroit. C’est vraiment aléatoire.

Julien Trocello : Nous sommes tous égaux face aux conditions, en revanche nos corps ne sont pas égaux dans leur manière de réagir à ces conditions. La préparation est essentielle et la dimension psychologique et sociale, la force mentale, l’effet de groupe, l’abnégation… peut nous permettre d’aller au-delà de nos limites. Quand on fait ce genre d’aventure, on a envie de se tester, de repousser ses limites, de voir jusqu’où on peut aller. Ça permet de mieux se connaître, d’apprendre sur soi, d’être humble aussi car on a beau avoir tous les éléments pour nous, si on ne respecte pas la montagne, on n’y arrive pas. Dans l’action, on le fait instinctivement sans s’en rendre compte. C’est après, quand on descend et qu’on échange avec des gens extérieurs au groupe, qu’on réalise ce que l’on a fait et qu’on arrive à poser des mots sur ce qu’on a vécu.

Certaines associations dénoncent l’impact environnemental des ascensions : est-ce un aspect dont vous tenez compte ?

Julien Trocello : L’Aconcagua est un cadre particulier. C’est un parc régional qui est extrêmement réglementé et surveillé par des rangers. Il y a zéro déchet, tout est ramassé et tout doit être ramené à la fin du trek, y compris les besoins. Car tout est pesé. Ils font des moyennes en fonction du poids des personnes… Du coup, il n’y a pas d’impact matériel sur la montagne. En revanche, établir un camp quel qu’il soit peut dégrader le lieu d’un point de vue physique. Mais d’un point de vue matériel, il n’y aura pas de déchet. En ce sens, on est très loin des photos qu’on peut voir des camps himalayens avec des déchets partout. L’Aconcagua, c’est autre chose. Mais d’une manière plus générale, évidemment si les expéditions ne changent pas leur mode de fonctionnement, on abîme forcément les écosystèmes où les personnes vont.

Éric Cancemi : Nous essayons d’être le plus propre possible nous-mêmes. Nous avons ce respect de la nature. On ne jette rien par terre, on ramasse quand on en trouve. Car dans l’association, on véhicule des valeurs qui ont du sens et l’écologie en fait partie.

Eric Cancemi Julien Trocello
Éric Cancemi et Julien Trocello © Photo Iulian Giurca / Monaco Hebdo

Vous êtes rentrés le 5 février 2023 : comment se passe votre retour en principauté ?

Julien Trocello : Le retour était très attendu, mais en même temps très compliqué. La première semaine, je l’ai hyper bien vécue parce que je me sentais très en forme. En revanche, cette semaine j’ai eu un petit contre-coup. J’ai enfin senti un peu de fatigue. Le fait de retourner au quotidien, d’avoir l’eau courante, la douche, les toilettes, un lit confortable… il faut quelque temps avant de s’en remettre. Et reprendre les relations, le travail… c’est très surprenant. On ne réalise pas la chance qu’on a de vivre dans ce confort extrême tant qu’on n’a pas vécu la disette, la carence. On ne peut pas s’imaginer à quel point c’est important d’avoir un robinet quand on veut de l’eau. Là-haut [au sommet – NDLR], il fallait prendre de la glace et la faire fondre. Le retour est donc un peu chaotique, mais ça fait du bien de rentrer, de revoir ses proches, et sa famille.

Éric Cancemi : Personnellement, j’ai deux ressentis. Il y a d’abord le papa et le mari content d’être rentré dans son foyer. Le retour à la vie active s’est bien passé, mais il m’a fallu du temps pour me réadapter, pour retrouver le goût du commerce [son métier – NDLR]. Et il y a aussi la rapidité à laquelle on vit. Tout va à 200 à l’heure ici, c’est incroyable. On ne s’en rend pas compte quand on est dans le bain, mais tout va très vite. Le décalage horaire a aussi été très difficile. J’ai très mal dormi la première semaine de retour. Ça commence à aller mieux, mais j’ai une fatigue interne et musculaire incroyable.

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