vendredi 19 avril 2024
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Hervé Aeschbach : « Le Covid-19 ne doit pas faire oublier le VIH »

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À l’occasion de la journée mondiale contre le virus du sida, le 1er décembre 2021, Fight Aids Monaco a organisé un événement hommage. Hervé Aeschbach, son coordinateur, rappelle combien il est important de se faire dépister et de se protéger, alors que la pandémie de Covid-19 ne faiblit pas.

Le virus du sida a tué 680 000 personnes dans le monde en 2020. Toujours aussi dévastateur depuis sa découverte officielle en 1983, la recherche évolue, mais elle n’arrive toujours pas à neutraliser le VIH, qui touche encore près de 38 millions de personnes sur le globe. Virus complexe, et hautement transmissible sexuellement, il infecte les cellules du système immunitaire et mute encore très facilement, ce qui rend d’autant plus difficile la génération d’anticorps à large fréquence pour bloquer l’infection. À l’heure actuelle, aucun vaccin n’a été jugé suffisamment fiable et efficace pour le mettre à mal. Récemment, le seul espoir de vaccin, testé en Afrique subsaharienne contre plusieurs variants du VIH, a pris fin, faute de résultats concluants. Fin 2021, seuls le dépistage et l’usage de protection permettent efficacement de se protéger du sida, comme l’a rappelé Fight Aids Monaco le 1er décembre 2021, à l’occasion de la journée mondiale contre le VIH. Mais la pandémie de Covid-19 semble avoir bousculé les progrès constatés sur les dix dernières années.

Baisse des dépistages

« La pandémie de Covid-19 doit être prise en charge, mais il ne faut pas oublier le VIH », rappelle en effet Hervé Aeschbach, coordinateur de Fight Aids Monaco, l’association de lutte contre le VIH, présidée par la princesse Stéphanie (1). « Nous constatons une diminution concrète du nombre de dépistages, ce qui augmente le risque de résurgence du virus, car il n’existe toujours pas de vaccin ». Cette diminution des dépistages s’explique, en partie, par l’accès plus difficile aux soins, perturbé en période de pandémie, compte tenu des contraintes sanitaires, mais pas seulement. Cette baisse est aussi le fait, selon Hervé Aeschbach, de comportements individuels : « Cumuler les tests anti-Covid et les dépistages VIH n’est jamais agréable, et un certain nombre de personnes s’en détournent. » À cela s’ajoute la mise entre parenthèses des campagnes de dépistage en ville, à destination du grand public, toujours pour raisons sanitaires. C’est notamment le cas de l’opération de journées de dépistages gratuits Test in the City, organisées habituellement chaque année à différents endroits de la principauté. Cette opération permet à chaque personne de savoir en quelques minutes si elle est porteuse du VIH, grâce à des tests rapides à orientation diagnostique (TROD). Seul point positif, la pandémie a au moins le mérite de faire avancer la recherche vers la découverte d’un potentiel vaccin contre le VIH, estime Hervé Aeschbach : « La recherche n’est pas impactée par la pandémie de Covid-19, car elle profite globalement des avancées en matière de développement des vaccins ARN, qui pourront, peut-être, aboutir à la création d’un vaccin contre le VIH. »

« La recherche n’est pas impactée par la pandémie de Covid-19, car elle profite globalement des avancées en matière de développement des vaccins ARN, qui pourront, peut-être, aboutir à la création d’un vaccin contre le VIH »

Hervé Aeschbach. Coordinateur de Fight Aids Monaco

Perte de vigilance

Mais les effets de la pandémie de Covid-19 restent globalement néfastes vis-à-vis de la lutte contre la propagation du sida. Elle a en effet une influence sur les rapports amoureux et sur la perte de vigilance, selon le coordinateur de Fight Aids Monaco : « Les rencontres amoureuses aboutissent plus facilement vers une prise de risques. Elles se font peut-être plus vite qu’avant, à domicile, et sans protection. Il y a un besoin d’adaptation à ces nouveaux modes de vie imposés par la pandémie. » Plus que jamais, la protection semble donc primordiale : « Il faut toujours privilégier les outils de prévention, comme les préservatifs, la prophylaxie pré-exposition (PrEP), et le dépistage pour une meilleure prise en charge. C’est d’autant plus important que les personnes traitées avec une charge virale indétectable sont susceptibles de ne plus transmettre le VIH », insiste Hervé Aeschbach. Le traitement anti-VIH permet en effet de réduire la quantité de virus, dite « charge virale », présente dans le sang et les liquides corporels, au point de la rendre indétectable.

Hommages

Pour rappeler les dangers du sida, mais aussi pour rendre hommage aux personnes qui ont perdu la vie à cause de ce virus, la princesse Stéphanie, entourée de personnalités de la principauté, a donc déployé des courtepointes mercredi 1er décembre 2021, sur le toit du musée océanographique. Cette initiative, entamée il y a dix ans à Monaco, renvoie aux hommages rendus aux États-Unis, dans les années 1980, aux victimes du sida qui ne pouvaient pas bénéficier d’obsèques et de sépultures convenables à cette époque, car jugées trop indignes aux yeux du grand public. Sur chacune de ces courtepointes, qui ont nécessité près de 170 heures de travail selon cette association, les proches de chaque disparu ont imaginé un décor pour lui faire honneur. Ce déploiement faisait donc écho à toutes les personnes emportées par la maladie, suivies par Fight Aids Monaco depuis sa création, il y a 17 ans. Mais aussi à tous ceux qui les ont accompagnés dans leur combat.

1) La princesse Stéphanie est présidente de l’organisation non gouvernementale Fight AIDS Monaco depuis sa création, en 2004. Elle a été nommée ambassadrice itinérante de l’ONUSIDA en 2006.