vendredi 19 avril 2024
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Un 14 juillet pas comme les autres

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Le 14 juillet avait un goût particulier cette année. Alors que le prince Albert assistait pour la première fois au défilé militaire à Paris, l’ambassadeur de France Hugues Moret annonçait publiquement son départ de Monaco.

Centenaire de la Première guerre mondiale oblige, sur les Champs-Elysées, les festivités du 14 juillet ont revêtu une dimension particulière cette année. Près de 80 nations ayant participé à la Grande Guerre ont défilé aux côtés de l’armée française. « Ce défilé a été celui de la paix retrouvée sur notre continent dans le souvenir des sacrifices consentis à partir d’août 1914. Nous n’oublions pas cependant qu’il y a cent ans, dans le choc somnambulique du sentiment national enflammé, nos nations et nos peuples allaient se précipiter dans l’abîme des tranchées et des gaz et faire périr une certaine idée de la fraternité entre les hommes », rappelle l’ambassadeur de France à Monaco Hugues Moret.
Plus d’un mois après les célébrations du D-Day en Normandie, le prince Albert II, invité par François Hollande, a d’ailleurs assisté à cette commémoration, accompagné du colonel et chambellan Luc Fringant. « Ce 14 juillet, le président de la République a souhaité que le prince de Monaco soit présent à ses côtés. Et que des carabiniers de sa garde (1) défilent, mêlés à nos militaires et à ceux des autres nations qui eurent part au conflit. J’y vois le symbole reconfirmé de nos liens historiques », ajoute le diplomate, qui a profité de cette commémoration pour livrer quelques messages.

Hugues-Moret-depart-14-juillet-2014@CDP-Charly-Gallo

Hadelin de la Tour de Pin, successeur ?
Premier d’entre eux : à l’hôtel Fairmont, lors de la soirée, l’ambassadeur de France a annoncé son départ. Trois ans après sa prise de fonction, le diplomate érudit et autodidacte, passé par l’Elysée et l’ONU, devrait remplir d’autres missions pour le Quai d’Orsay. Sauf changement de dernière minute, c’est Hadelin de la Tour de Pin Chambly de la Charce, secrétaire permanent pour le Pacifique et ambassadeur, représentant de la France auprès de la communauté du Pacifique, qui devrait lui succéder. Cet énarque de 62 ans (promotion Malraux) a été ambassadeur en Guinée, au Sierra Leone, au Zimbabwe et au Venezuela.
Avant de passer la main, fort de son expérience en principauté, Moret a rappelé, devant les personnalités du gouvernement et du Palais, les fondements de la relation franco-monégasque. « Si elle a connu parfois, très rarement, des secousses ou des saccades, ce qui la caractérise c’est l’excellence de nos rapports, et leur grande confiance. Cette relation, c’est d’abord, et avant tout, presque essentiellement, le lien qui s’établit, dans la période contemporaine, entre les présidents de la République et les princes de Monaco. Ce rapport personnel est la clé de voûte de notre relation. » Si l’actualité de cette relation bilatérale tient à la préparation de la Conférence de Paris en 2015 sur le climat, la question de la transparence financière reste bien évidemment un dossier brûlant. Surtout avec « la signature annoncée, et imminente, par la Principauté de la convention OCDE sur l’échange automatique des données fiscales. »

Négociation avec l’UE en ligne de mire
Autre poids lourd à venir : la négociation avec l’UE. « Monaco a souhaité se rapprocher de l’Union européenne et de son grand marché intérieur. Un mandat de négociation est à l’étude en ce moment. S’il appartient à Monaco à la fin de se déterminer sur le degré de rapprochement que la Principauté souhaite fixer avec l’Union européenne et la Commission, la France participe activement à la négociation, selon nos intérêts communs, qu’il conviendra de conforter ensemble, jusqu’au bout », a insisté le diplomate. Histoire de marquer le territoire des intérêts français dans ces discussions qui manifestement, ne se dérouleront pas à deux mais à trois voix… Un discours qui a crispé le visage de quelques officiels. Pourtant, durant trois ans, ce sont bien les intérêts de la France que Moret a défendu, que ce soit sur les dossiers du télétravail ou des octrois de visas. Quant à ceux de l’ambassade de France à Monaco, à la veille de son départ, il les consacre encore (« nos rapports (franco-monégasques) s’établissent au quotidien par la voie diplomatique » a-t-il plaidé). En principauté, le quinquagénaire prétend en tout cas s’être « régalé ». Y compris en observant la vie politique locale. « J’ai suivi au jour le jour les élections au conseil national. Que de passion, de mobilisation et d’énergie civique ! J’étais venu avec le manuel constitutionnel de Georges Grinda, je me suis replongé, parfois, dans Tacite et Hobbes… », a plaisanté, malicieux, Hugues Moret, pour son dernier discours de 14 juillet.

(1) Ont défilé le 14 juillet deux carabiniers du prince, le Capitaine Gilles Convertini, et le maréchal des logis-chef Jean-Louis Bouviala ainsi qu’un sapeur-pompier de Monaco, le sergent-chef Didier Cattin. Quatre étudiants boursiers monégasques, ayant décroché une mention très bien au baccalauréat, les accompagnaient.