Un lanceur d’alerte a communiqué un rapport confidentiel qui indique que Pékin a dissimulé qu’en décembre 2019, des villes de la province du Hubei, dont sa capitale, Wuhan, ont vu le nombre de grippes exploser, et être parfois jusqu’à 20 fois plus importants que les chiffres constatés en 2018.
Très exactement un an après l’apparition du premier cas de Covid-19 à Wuhan, la polémique a été lancée le 1er décembre 2020 par des médias américains. La chaîne américaine CNN et le Wall Street Journal se sont fait l’écho d’informations qui mettent les autorités chinoises dans l’embarras. Un lanceur d’alerte a fait parvenir à CNN un rapport confidentiel de très exactement 117 pages, écrit par le centre de contrôle et de prévention du Hubei. Ce document indique qu’en décembre 2019, les autorités régionales n’auraient pas transmis une information essentielle : un nombre de grippes jusqu’à 20 fois supérieur à 2018, constaté dans une série de villes de la province de Wuhan, la capitale Wuhan étant inclue dans cet ensemble. Silence radio donc sur ce fait. Si l’on en croit le Livre blanc publié le 7 juin 2020 par la Chine, il aura fallu attendre le 30 décembre 2019 pour que les autorités de Wuhan ne communiquent autour de mystérieux cas de pneumonie. Mais on n’évoque alors pas de transmission d’homme à homme.
Rumeur
Toujours d’après le contenu du rapport cité par CNN, le nombre de contaminations aurait aussi été sous estimé, voire minimisé. Le 10 février 2020, les autorités évoquaient 2 478 nouveaux cas, alors que, le même jour, les autorités de Hubei rapportaient 5 918 malades. Du côté chinois, on se défend en avançant l’hypothèse que ce virus pourrait avoir été importé. On se souvient du tweet publié le 12 mars 2020 par Zhao Lijian, l’un des porte-parole du ministère des affaires étrangères à l’encontre des Etats-Unis : « Quand le patient zéro est-il apparu aux Etats-Unis ? Combien de personnes sont infectées ? Quels sont les noms des hôpitaux ? C’est peut-être l’armée américaine qui a apporté le virus à Wuhan. Soyez transparents ! Rendez publiques vos données ! Les Etats-Unis nous doivent une explication. » Le sujet s’est donc déplacé dans la sphère géopolitique, même si les autorités chinoises répètent également qu’il faut laisser les scientifiques travailler afin d’identifier l’origine du virus. Du côté de l’opinion publique chinoise, certains estiment que des soldats américains auraient pu ramener le virus à Wuhan à l’occasion des Jeux olympiques (JO) militaires en octobre 2019. Une rumeur contestée par le président américain, Donald Trump. La Chine a aussi évoqué le scénario de produits surgelés contaminés venant de l’étranger, jugeant que le virus, ou des traces de virus, pourraient se trouver sur l’emballage ou sur les produits eux-mêmes.
« Preuves »
Le quotidien chinois le Global Times, qui suit la logique éditoriale du Quotidien du Peuple, le journal officiel du Parti communiste chinois, évoque pour sa part des études qui montreraient que le Covid-19 aurait fait son apparition avant décembre 2019 : « Une étude de l’institut national du cancer de Milan a trouvé le nouveau coronavirus dans des échantillons de sang collectés en octobre 2019 et des recherches menées par l’université de Barcelone ont montré la présence du virus dans des échantillons d’eaux usées dans la ville en mars 2019 », écrit le Global Times dans son édition du 1er décembre 2020. De son côté, le Wall Street Journal rapporte que, sur 7 389 échantillons de sang collectés par la Croix-Rouge dans neuf Etats des Etats-Unis entre le 13 décembre 2019 et le 17 janvier 2020, 106 étaient contaminés par le Covid-19. Des informations qui font dire au Wall Street Journal que le SARS-CoV-2 se serait diffusé dans le monde « bien avant que les autorités sanitaires et les chercheurs en soient conscients ». Du côté chinois, on estime que tout cela confirme la véracité de ses positions. « Selon une récente étude gouvernementale, le nouveau coronavirus a infecté des personnes aux États-Unis dès la mi-décembre 2019, ajoutant à un certain nombre de preuves croissantes montrant que le Covid-19 était probablement présent dans des pays comme les États-Unis, l’Italie et la France plus tôt qu’on ne le pensait auparavant », assure le Quotidien du Peuple le 2 décembre 2020. Au final, seule une enquête approfondie sur le terrain, en Chine, réalisée par une équipe d’experts internationaux indépendants, pourrait permettre d’y voir plus clair et de trancher ce débat. Un groupe de scientifiques de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est prêt. Il attend depuis des mois l’autorisation officielle des autorités chinoises. En vain, pour le moment.
