samedi 20 avril 2024
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Difficultés de recrutement à l’hôpital : « Aujourd’hui, le logement est réellement un facteur bloquant »

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Pour tenter de faire face aux difficultés de recrutement, la ville de Nice et le CHU ont récemment signé une convention de partenariat facilitant l’accession à des logements du parc social pour le personnel hospitalier. Un argument de poids, à l’heure où les établissements de la région sont engagés dans une course à la séduction.

C’est une très bonne nouvelle pour le CHU de Nice, moins pour le centre hospitalier princesse Grace (CHPG). En proie à des difficultés de recrutement, l’hôpital public azuréen vient de conclure une convention de partenariat avec la ville de Nice pour faciliter l’accession à des logements du parc social pour le personnel hospitalier. « Malgré les efforts déjà importants des services de l’État et de la ville de Nice qui mobilisent leur contingent et proposent des candidats employés par le CHU, la volonté des partenaires est d’aller plus loin », justifie la municipalité dans un communiqué. Concrètement, plusieurs bailleurs sociaux (CDC Habitat, Erilia, Grand Delta Habitat et Côte d’Azur Habitat) « rendront accessible leur offre locative intermédiaire aux professionnels hospitaliers » et « proposeront des logements intermédiaires disponibles dans leur parc immobilier à un loyer situé entre celui du libre et celui au plus haut du logement social ». En d’autres termes, les loyers seront fixés en fonction du niveau de revenus. Les plus modestes pourront ainsi bénéficier des tarifs du parc social. Un coup de pouce loin d’être anodin quand on connaît les loyers pratiqués dans la région. « Je remercie l’ensemble des bailleurs qui ont accepté de s’engager dans notre démarche qui renforcera l’attractivité du CHU de Nice et doit nous permettre d’améliorer la qualité de vie de ses personnels », a souligné Anthony Borré, premier adjoint délégué au logement lors du conseil municipal du 9 décembre 2022. Du côté du CHU, on se félicite évidemment de cet accord qui se veut « l’aboutissement d’un travail entamé dans le cadre de notre politique de fidélisation des salariés, explique à Nice Matin, Karine Hamela, directrice des ressources humaines (DRH) du CHU. Nous avons environ 150 postes à pourvoir chaque année, dont beaucoup d’infirmiers. Or, les tarifs de l’immobilier constituent un frein à la mobilité géographique. […] Nous avions même envisagé de construire afin de résoudre cette problématique. Toutefois, ce projet va peut-être permettre de répondre aux besoins. Nous allons prendre le temps de voir quels sont les résultats ».

Une aide à l’installation au CHPG

« Aujourd’hui, le logement est réellement un facteur bloquant, confirme la directrice du CHPG Benoîte Rousseau de Sevelinges. De notre côté, nous avons le projet d’avoir un interlocuteur à la DRH, qui aide les agents à s’installer en les orientant vers des agences immobilières et en ayant un pool d’annonces privées un peu plus important. Nous proposons par ailleurs une aide à l’installation, c’est-à-dire que nous disposons d’un immeuble à Beausoleil dans lequel sont logés nos élèves infirmiers. Dans cet immeuble, nous avons aussi gardé des appartements que ce soit pour des médecins ou du personnel paramédical qui viendraient de loin. Le but, c’est de leur proposer des appartements meublés pendant six mois à des tarifs défiant toute concurrence pour leur permettre de choisir de pérenniser, ou pas, cette décision ». Pour faciliter l’installation de ses collaborateurs, l’hôpital de Monaco dispose enfin de plusieurs appartements dans des immeubles domaniaux à la ZAC Saint-Antoine et à Roquebrune. « Et nous ne cessons d’en demander davantage », confie la directrice d’établissement, consciente de devoir composer avec quelques spécificités locales qui peuvent s’avérer rebutantes pour des candidats venant du pays voisin. « Aujourd’hui, c’est très clair, les freins pour venir travailler au CHPG, c’est l’accessibilité et le parking. Ce sont deux choses sur lequel le CHPG n’a pas la main. Le logement vient en troisième. Sur le reste, nous faisons tout ce que nous pouvons », promet Benoîte Rousseau de Sevelinges.

« Nous avons un certain nombre de candidats qui envoient leur CV aux deux structures [au CHU et au CHPG — NDLR] et qui regardent l’écart de salaire. Est-ce qu’il justifie, ou pas, un temps de trajet supplémentaire et des problèmes de stationnement ? La balance se fait comme ça »

Benoîte Rousseau de Sevelinges. Directrice du centre hospitalier princesse Grace (CHPG)

« Nous sommes impuissants »

Malgré une concurrence qu’elle reconnaît « très forte » entre les établissements de la région, la signature de cette convention de partenariat entre la ville de Nice et le CHU ne l’inquiète pas outre mesure : « Cette initiative est excellente. De toute façon, je ne vois pas le CHU comme un concurrent, mais comme un partenaire. J’ai donc plutôt tendance à être ravie car quand le CHU ne va pas bien, ça se répercute aussi sur le CHPG avec des patients qui ne vont pas bien ». Pour la directrice de l’hôpital de Monaco, cet accord démontre toutefois, s’il le fallait encore, « la pénurie des métiers de santé » et la nécessité pour l’État monégasque de « continuer à travailler pour attirer des professionnels ». « Aujourd’hui, nous avons un certain nombre de candidats qui envoient leur CV aux deux structures [au CHU et au CHPG — NDLR] et qui regardent l’écart de salaire. Est-ce qu’il justifie, ou pas, un temps de trajet supplémentaire et des problèmes de stationnement ? La balance se fait comme ça », explique Benoîte Rousseau de Sevelinges qui a encore récemment déploré la démission d’un de ses salariés pour ces raisons. « Il travaillait depuis un certain nombre d’années au CHPG, et il était très heureux. Mais il a finalement décidé d’aller à Nice, car il en avait marre de la route. Et je comprends tout à fait son raisonnement. Nous avons vraiment besoin de l’aide du gouvernement, parce que, malheureusement, nous sommes impuissants ». Ce soutien passera-t-il par une construction, comme cela a un temps été envisagé par le CHU de Nice ? « Nous n’avons pas du tout de projet de logements en propre, réfute la directrice du CHPG. L’hôpital n’en a pas les épaules et nous ne sommes pas structurés pour. Il faudrait créer un secteur dédié ». L’ouverture prochaine du Cap Fleuri II et celle, plus lointaine, d’une troisième maison de retraite sur le territoire national, interrogent par ailleurs Benoîte Rousseau de Sevelinges. « Elles vont forcément nécessiter des embauches. Et si nous ne sommes pas en mesure de proposer aux agents des conditions qui vont les attirer, ce n’est pas la peine de construire les bâtiments », estime-t-elle avant de tempérer : « Mais je ne suis pas du tout inquiète. Aujourd’hui, nous voyons la pénurie, mais nous n’en sommes pas victimes. C’est plus difficile qu’avant d’attirer du personnel. Ce qui ne veut pas dire qu’on ne parvient pas à en attirer ».

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