Utilisées contre la dépression, l’insomnie ou certains cancers, les plantes médicinales sont de plus en plus en vogue, mais pas toujours sans danger. Depuis le 1er mai, une réglementation européenne tente d’aider le consommateur à se repérer dans ce marché en plein essor.
Un coup de valériane contre les insomnies, un peu de pissenlit pour la digestion ou de pavot pour parer à la douleur… A l’heure où l’innocuité des médicaments est mise à mal par les scandales à répétition, le recours aux plantes rallie un nombre croissant d’adeptes. Mis à contribution pour soigner les symptômes aigus, les rayons « phyto » le sont également de plus en plus pour accompagner le traitement de pathologies plus lourdes – comme le diabète, l’hypertension ou même certains cancers. Selon de récentes études, plus de 40 % des patients atteints de cancers du sein et 20 % de ceux atteints de cancers du poumon en Europe y auraient recours.
Eventuelle toxicité
Faut-il encore savoir à quelles tiges, racines ou feuilles se fier. Pas forcément évident car tout traitement naturel n’est pas sans risque. Au contraire même?: si elle est bien connue pour ses effets immédiats, l’éventuelle toxicité des plantes est autrement plus difficile à évaluer sur le long terme dans le cadre de traitements au long cours. Des complications hépatiques sont ainsi récemment survenues avec des gélules à priori innocentes, d’autres plantes comme la réglisse ont révélé des interactions préoccupantes avec certains traitements contre l’hypertension… Plus inquiétant?: la profusion de plantes médicinales de mauvaise qualité vendues dans les rayonnages et sur le net, qui alerte de plus en plus les herboristes. Difficile de garantir l’identité de la plante vendue et ses conditions réelles de production. Selon les experts de l’AFSSAPS (l’autorité de sécurité sanitaire française), une grande partie des accidents ces dix dernières années serait liée à ce type de plantes.
Pour mettre de l’ordre dans les rayonnages et rassurer les patients, les autorités européennes viennent d’imposer depuis le 1er mai un cadre réglementaire sans précédent. Non seulement les fabricants de médicaments à base de plantes devront réunir une bibliographie prouvant l’usage médical des plantes concernées mais ils devront établir leur utilisation sans accrocs depuis quinze ans pour les producteurs européens et trente ans pour ceux issus de pays hors U.E.
400 fabricants sur le carreau??
Si un tel cadre devrait mettre à mal un bon nombre de producteurs de plantes bas de gamme aux garanties incertaines, il risque du même coup de condamner de nombreux producteurs locaux n’ayant pas les moyens de se conformer aux normes imposées. Selon certains spécialistes, plus de 400 fabricants risquent de se retrouver sur le carreau et l’offre de compléments alimentaires pourrait fondre de… 30 %?! Pétitions et recours se multiplient déjà pour contrer la réglementation – le gouvernement indien a même dépêché en catimini une délégation à Bruxelles pour s’inquiéter de la place des traitements de médecine ayurvédique dans le nouveau dispositif… Au-delà même de la mise à l’écart annoncée d’une partie des fabricants, l’enjeu se situe désormais dans la formation des spécialistes et l’information des patients sur ces nouveaux traitements en vogue, mais pas toujours bien employés. « L’éducation du public et la formation des professionnels à l’herboristerie sont les enjeux prioritaires », rappelait récemment Thierry Thevenin, herboriste et président du syndicat SIMPLES de producteurs. Affaire à suivre.