À l’occasion de la 15ème biennale de cancérologie au Grimaldi Forum, qui s’est déroulée du 26 au 29 janvier 2022, Denis Maccario, président de la fondation Flavien, qui finance notamment la recherche, a plaidé pour un essai clinique à Monaco autour de la molécule Axitinib, qui pourrait réduire la souffrance des enfants touchés par un cancer du cerveau. Mais cette molécule appartient au géant Pfizer.
Le combat continue, car le cancer tue toujours. En France, les dernières données recueillies estiment que 89 600 hommes et 67 800 femmes sont morts d’un cancer en 2018, comme l’a reporté l’Institut national du cancer (INCa). Certes, la recherche permet de mieux traiter les cas — ils étaient 382 000 à avoir été décelés la même année — mais la communauté scientifique a encore besoin d’affiner ses études pour mieux le prévenir, avant de le guérir. C’était d’ailleurs l’idée de la 15ème édition de la biennale monégasque de cancérologie, organisée entre les murs du Grimaldi Forum : « Échanger sur les connaissances les plus récentes dans le domaine de la cancérologie, et promouvoir les prises en charge médicales les plus innovantes », pour reprendre les mots du conseiller-ministre de la santé et des solidarités, Didier Gamerdinger. « Échanger sur l’émergence des dernières innovations thérapeutiques, et fournir une mise à jour complète à tous les professionnels de santé présents », a ajouté Xavier Pivot, président de l’événement.
« Un essai clinique de cette taille-là pourra apporter une meilleure image, autre que l’image mercantile que nous avons des laboratoires »
Denis Maccario. Président de la fondation Flavien
« Papa, il y a les autres »
À n’en pas douter, il y avait « la crème de la crème », des grands noms de la science parmi les rangs des chercheurs comme le professeur Jean-Yves Blay, lauréat du prix Duquesne en 2020, qui récompense une découverte majeure en cancérologie, ou encore Gilles Pagès, directeur de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), spécialiste de la vascularisation des tumeurs, et des gros laboratoires comme Pfizer et Astrazeneca, pour ne citer qu’eux. Mais il y avait aussi une voix, qui s’est distinguée au milieu des stands et des conférences académiques. Une voix posthume, d’un petit garçon, qui disait : « Papa, il y a les autres ». Cette voix, c’était celle de Flavien, disparu à l’âge de 8 ans d’un cancer du cerveau métastasé, comme l’a rappelé son père, Denis Maccario, au stand de son association. Avec la fondation Flavien, il finance les travaux de chercheurs, dont certains figuraient parmi les invités de cette biennale. Entre 2015 et 2020, sa fondation a reversé 643 500 euros à la recherche, toujours motivé par la promesse faite à son fils d’aider les autres enfants victimes d’un cancer. Cette année encore, la fondation Flavien versera 100 000 euros grâce aux dons récoltés, et probablement la même somme en 2023, car les besoins sont grands : « On est tous touchés par le cancer aujourd’hui, de près ou de loin, vu la toxicité de notre environnement ».

Pour un essai clinique à Monaco
Les fonds de la fondation Flavien permettront notamment de financer la recherche en hématologie, pour aider les personnes atteintes d’un cancer de fonder leur famille : « On en parle aux jeunes adultes, mais aussi aux adolescents et aux adolescentes, car il existe des techniques de préservation de fertilité », explique Denis Maccario. Mais aussi la recherche en matière d’intelligence artificielle, notamment avec le CHU de Rennes, représenté à la biennale monégasque par le docteur Marie de Tayrac. Et, comme lors de la précédente édition, le président de la fondation Flavien milite pour que Monaco initie un essai clinique autour de la molécule Axitinib, une molécule qui pourrait, selon lui, réduire les souffrances et les séquelles des enfants touchés par un cancer du cerveau, en permettant de cibler les cellules cancéreuses, sans détruire les cellules saines : « C’est une chance pour nos enfants. Il ne faut pas la laisser passer », assure Denis Maccario. Mais cette fameuse molécule Axitinib appartient au laboratoire Pfizer, et le président de la fondation Flavien espère que ce géant pharmaceutique américain fournisse la molécule et prenne en charge l’essai clinique à Monaco : « Même si c’est une question d’argent, on parle là d’enfants », plaide-t-il, sachant que Pfizer n’a toujours pas donné son accord. Ce géant pharmaceutique acceptera-t-il de faire cet effort ? « Un essai clinique de cette taille-là pourra apporter une meilleure image, autre que l’image mercantile que nous avons des laboratoires », expliquait Denis Maccario dans nos colonnes l’an dernier. Pour rappel, le groupe pharmaceutique Pfizer, ainsi que Flynn Pharma, ont écopé d’une amende record de 99,4 millions d’euros (84,2 millions de livres) en 2016, par l’autorité britannique de la concurrence, pour avoir augmenté de 2 600 % le prix d’un traitement de l’épilepsie. Au Royaume-Uni, le prix d’une boîte de 100 mg de phénytoïne sodique était en effet passé de 2,83 livres à 67,50 livres en 2012, avant de revenir à 54 livres en mai 2014. Les deux entreprises ont finalement obtenu gain de cause en 2018 auprès du tribunal d’appel de la concurrence, qui a renvoyé l’affaire. Pfizer a notamment expliqué que ce médicament était alors vendu à perte, et il avait envisagé de cesser sa commercialisation. Mais cette affaire, qui s’ajoute à d’autres condamnations, comme celle record de 2,3 milliards de dollars versée en 2009 pour pratiques commerciales frauduleuses, a entaché l’image de ce géant pharmaceutique. « Nos enfants tombent, même sans aller à la guerre. Médiatiquement, on s’interroge, on s’émeut, mais on ne fait rien d’autre. Alors, avec l’association, on agit tous les jours, et on essaie d’aller plus loin que l’émotion », rappelle Denis Maccario, qui assure que le Centre scientifique de Monaco (CSM) est « en train de devenir un leader mondial », capable d’assurer un tel essai clinique. Rien de tel que cette biennale pour faire avancer le dossier en coulisses.