vendredi 29 mars 2024
AccueilActualitésInternationalL'élection américaine vue de l'intérieur

L’élection américaine vue de l’intérieur

Publié le

photo de Fabrice Marquet
Fabrice Marquet © Photo D.R.

Monégasques et enfants du pays vivant aux Etats-Unis nous donnent leur avis sur la campagne électorale américaine. Cette semaine, Fabrice Marquet, chercheur monégasque à l’université de Columbia,

Monaco Hebdo : Comment observez-vous la campagne en cours aux Etats-Unis ?
Fabrice Marquet : L’élection aux Etats-Unis a vraiment eu un regain d’intérêt depuis le premier débat. Pour les Américains, il s’agit de la dernière ligne droite avant le vote. Généralement, je dirais qu’aux Etats-Unis, les gens sont plus impliqués dans la politique du pays. Ceci provient du fait que leur système fédéral fonctionne plutôt bien. Il est assez facile de prendre contact avec les représentants politiques locaux et de porter une opinion jusqu’au sénateur de l’Etat correspondant, qui ira défendre cette idée à Washington. L’accès aux informations et aux analyses est aussi vraiment développé. Les quatre grandes chaînes proposent des émissions politiques chaque dimanche matin tout au long de l’année. C-span est facilement accessible et CNN analyse des points importants de chaque programme (par exemple, le financement du programme Medicare) et explique en profondeur les différences entre les deux candidats surtout pour couper court à toute tentative de démagogie. Dans le cas présent, chaque camp aime clamer que voter pour Mitt Romney correspond à tuer le programme Medicare, ce qui est faux mais le financement de ce programme diffèrera.

M.H. : Parle-t-on peu ou beaucoup de l’élection autour de vous ? Qu’est-ce qui vous marque ou vous étonne dans cette campagne ?
F.M. : Autour de moi, on parle souvent de l’élection mais les Etats-Unis sont un immense pays avec beaucoup de sensibilités différentes. Vivant dans un environnement universitaire et progressiste, il est difficile pour moi d’avoir une opinion non-biaisée. Quant aux candidats et leurs programmes à proprement parler, on observe la même chose qu’en Europe, à savoir un déplacement vers les extrêmes. Le parti républicain a des positions réellement conservatrices surtout sur des sujets touchant de près ou de loin à la religion, comme l’IVG. Pour moi, l’exemple flagrant est la réflexion faite par Mitt Romney après son incident d’avion (« pourquoi on ne peut pas ouvrir les fenêtres ? »). Cela démontre une profonde ignorance pour les principes basiques scientifiques qui tend vers le dédain. Mais qu’on ne se trompe pas, les Etats-Unis ont toujours plusieurs décennies d’avance sur plusieurs sujets de société (intégration des différentes communautés ethniques, droits des gays et lesbiens…). Les Etats-Unis ont élu leur premier président noir seulement quelques années après que la France a intronisé son premier présentateur de journal télévisé noir.

M.H. : Y a-t-il selon vous une tendance qui se dégage pour un candidat plus que pour un autre ?
F.M. : L’issue de cette élection est incertaine surtout à cause du système de vote indirect par Grands électeurs. Finalement peu d’Etats, les Swing States, sont réellement importants pour l’élection et il est très difficile de porter un jugement sur le résultat final, même dans le cas de sondages globaux très pondérés vers un candidat. Qui plus est, aujourd’hui, les deux candidats sont au coude à coude dans les sondages. Ceci contraste réellement avec la France où le candidat gagnant est fortement pressenti avant même le premier tour et où on observe peu de surprises. Depuis 1995, seuls la présence de Jean-Marie Le Pen au deuxième tour en 2002 et dans une moindre mesure, l’élimination d’Edouard Balladur au premier tour en 1995 en ont été.