Le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Nils Muižnieks, était en visite à Monaco. Objectif : évaluer si les enfants, les personnes LGBTI et les handicapés sont suffisamment protégés en Principauté.
Il travaille depuis une vingtaine d’années dans le domaine des droits de l’homme. Le Letton Nils Muižnieks a effectué une visite de plusieurs jours à Monaco. Son objectif : évaluer si « les groupes vulnérables » — notamment les enfants, les handicapés et les personnes lesbiennes, gays, bisexuels, trans et intersexes (LGBTI) — sont suffisamment reconnus et protégés en Principauté. Ceci, aussi bien d’un point de vue juridique qu’institutionnel. Après avoir rencontré les associations, les représentants de la société civile et les autorités politiques du pays, le commissaire du Conseil de l’Europe assure ne pas avoir découvert de « problèmes très sérieux en Principauté ». Il n’y aura donc pas de rapport au vitriol contre Monaco, mais quelques recommandations.
Union civile
Nils Muižnieks invite notamment Monaco à s’aligner sur la « tendance européenne », en reconnaissant juridiquement les unions civiles entre hommes et femmes, et entre homosexuels. En octobre 2016, un premier pas a été franchi, puisque les élus du Conseil national ont adopté à l’unanimité une proposition de loi créant un « contrat de vie commune » (CVC) en Principauté (1). « Plus de la moitié des États membres du Conseil de l’Europe, soit 24 pays, reconnaissent juridiquement de telles unions. J’ai donc encouragé les autorités à concrétiser rapidement ce projet à Monaco, en tenant pleinement compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à cet égard », indique le commissaire. Rappelons en effet qu’en 2015, dans un arrêt intitulé « Oliari et autres contre Italie », la CEDH a sanctionné l’Italie qui ne proposait pas dans sa législation d’union civile pour les couples non mariés, y compris de même sexe. Une absence contraire à l’article 8 de la CEDH qui garantit le « droit au respect de la vie privée et familiale ». Une jurisprudence qui pourrait donc peser dans les prochains débats.
Châtiments
Tout comme le comité des droits de l’enfant de l’ONU l’avait fait en 2013, Nils Muižnieks encourage aussi Monaco à se doter d’une loi spécifique sur les châtiments corporels à l’égard des enfants : « L’objectif est d’indiquer clairement qu’aucune forme de violence à l’égard des enfants ne peut être acceptée », indique Muižnieks, en soulignant qu’une trentaine d’Etats membres du Conseil de l’Europe ont déjà adopté une telle interdiction.
Auto-saisine
S’il félicite Monaco d’avoir créé un Haut commissariat à la protection des droits, des libertés et à la médiation, Nils Muižnieks souhaiterait toutefois que les pouvoirs de l’“ombudsman monégasque” soient renforcés. Comment ? En donnant un pouvoir d’auto-saisine au commissaire : « Pour le moment, le commissaire peut réagir s’il y a des plaintes, mais il ne peut pas mener des enquêtes. Or, partout en Europe, de telles institutions ont le pouvoir d’auto-saisine. » Nils Muižnieks souhaite aussi que les enfants puissent saisir directement cette entité, sans forcément la présence d’un représentant légal : « Je ne pense pas qu’il faille créer un nouvel “ombudsman” spécifiquement pour les enfants, mais il faut donner des pouvoirs d’auto-saisine au commissaire dans ce domaine. Et permettre également à cette entité de recevoir des plaintes directement des enfants. » Le commissaire du Conseil de l’Europe considère enfin que Monaco devrait étoffer son cadre juridique en matière de discriminations, en adoptant une loi-cadre : « Beaucoup de pays en Europe ont voté ces lois-cadres. Cela peut aider à sensibiliser les policiers, les procureurs ou encore les juges. Et cela donne un signal à la société sur l’importance de l’égalité des chances pour tous. »
(1) Proposition de loi déposée en juin 2013 par la minorité Union Monégasque (UM).