vendredi 29 mars 2024
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Coopération internationale : objectif, un million de bénéficiaires directs

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La direction de la coopération internationale monégasque vient de présenter sa stratégie 2018-2020 pour son plan d’aide publique au développement. Décryptage.

Aider plus d’un million de bénéficiaires directs de 2018 à 2020 : c’est le grand objectif que s’est fixé la coopération monégasque. Sur la période 2015-2017, les bénéficiaires étaient 800 000. « Nous nous recentrons sur 11 pays d’intervention. Et nous portons nos efforts sur sept pays africains les moins avancés (PMA) : le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Burkina Faso, Madagascar, le Sénégal et le Burundi. Notre priorité sera la région du Sahel », explique à Monaco Hebdo Bénédicte Schutz, directeur de la Coopération Internationale (DCI). Cette nouvelle stratégie s’articule autour de six grands axes : l’augmentation significative de l’aide publique au développement, le recentrage sur onze pays — dont sept PMA africains —, le renforcement de l’aide directe aux acteurs locaux, la sécurité alimentaire, le renforcement de l’aide humanitaire d’urgence, et donc, l’objectif de plus d’un million de bénéficiaires directs.

« Pauvreté »

En 1993, la Principauté a officiellement adhéré à l’organisation des Nations Unies (ONU). En 2000, Monaco a adopté les huit objectifs du millénaire pour le développement (OMD). En 2003, un bureau de la coopération internationale a été créé et une direction a vu le jour en 2007. En 2015, la principauté a adopté les 17 objectifs de développement durable (ODD). « Les dix-sept objectifs de développement durable sont la nouvelle feuille de route de l’ONU. C’est-à-dire, qu’ils englobent tous les défis pour éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous, d’ici à 2030 », souligne Bénédicte Schutz. « La coopération monégasque poursuivra ses actions en lien avec les six premiers objectifs. C’est-à-dire, ceux centrés sur l’être humain : la lutte contre la pauvreté et la faim, l’accès à la santé, l’éducation et l’insertion socio-économique », précise le directeur de la DCI. En 2018, la DCI a donc lancé son nouveau plan stratégique 2018-2020. Pour Bénédicte Schutz, « il est important de dissocier le budget du plan stratégique, et celui de l’APD. Auparavant, nous avions 12 pays partenaires. Mais, la Mongolie va sortir du plan d’actions. Les résultats positifs enregistrés ces dernières années permettent sa sortie. C’est un signe positif. »

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« Recentrage »

Selon l’OCDE, l’aide publique au développement comprend les dons et les prêts préférentiels. Lesquels sont prévus au budget, et transférés des pays développés, vers les pays en voie de développement (PVD). « Avant, on parlait des OMD, adoptés en 2000 à New York. C’était moins globalisé, et plus axé sur les PVD. Aujourd’hui, les Nations Unies travaillent sur le développement durable avec les dix-sept ODD. Ces objectifs sont interdépendants », ajoute Bénédicte Schutz. Depuis 1990, les pays développés ont compris que l’APD n’est pas seulement une affaire d’apport de connaissance technique. Mais qu’elle doit aussi respecter la diversité culturelle. « Délivrée sous forme de dons, l’aide publique au développement monégasque permet de soutenir, chaque année, 130 projets dans 11 pays. Le recentrage se fera dans les sept PMA, avec une attention particulière pour les populations vulnérables », glisse Bénédicte Schutz.

« Locaux »

L’aide publique au développement est la forme la plus connue de l’aide au développement. Mais, l’aide au développement provient aussi de particuliers, d’entreprises, d’ONG et de fondations. Ce type d’action peut prendre différentes formes : financement de projets par dons, prêts d’argent à taux préférentiel, et annulation de dettes. « A travers l’aide publique au développement, nous allons travailler avec les meilleurs acteurs locaux. Ils sont expérimentés, et permettent un travail à moyen et long terme. Nous voulons un développement des ressources humaines locales », a expliqué Bénédicte Schutz. Pour la période 2015-2017, le plan monégasque prévoyait d’injecter 37 millions d’euros d’aide publique au développement, soit, 1,02 % des recettes de l’Etat. Environ 400 projets ont été réalisés. 800 000 bénéficiaires directs ont été identifiés, dont 80 000 réfugiés. Moins de 9 % de frais de fonctionnement. Bénédicte Schutz : « Il faut remarquer que ramenée au nombre de nationaux, l’APD monégasque fait de la principauté l’Etat le plus solidaire au monde. »

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Projets

Les projets de développement ont un budget établi, une unité de lieu, et sont limités dans le temps. Ils sont en général mis en place, conjointement, par un bailleur de fonds et des acteurs locaux des pays en voie de développement : un ministère, une ONG internationale ou locale, une organisation de producteurs, une organisation professionnelle, et une collectivité locale. « Sur la période 2018-2020, 30 % minimum de l’aide publique au développement de Monaco seront alloués directement aux acteurs locaux publics ou privés », ajoute Bénédicte Schutz. Un appui technique sera assuré par le corps des sapeurs-pompiers monégasques, le centre hospitalier princesse Grace (CHPG), le centre cardio-thoracique de Monaco (CCTM) et l’institut monégasque de la médecine du sport (IM2S). Le plan stratégique mettra la priorité sur quatre domaines d’intervention : l’éducation, la santé, l’insertion socioéconomique et la sécurité alimentaire. Bénédicte Schutz : « A travers nos programmes phares, l’aide directe aux acteurs locaux va être renforcée. Nos cœurs de cible sont les populations vulnérables. C’est-à-dire, les enfants, les femmes en situation de précarité, les personnes en situation de handicap et les réfugiés. » Ainsi, la DCI entend agir, de manière concrète, à travers six programmes phares : le soutien à l’enfance vulnérable et en situation de rue, l’appui à la nutrition infantile, la protection civile, la création d’emplois, la lutte contre les pandémies et la drépanocytose. En 1974, le Conseil Alimentaire Mondial (CAM) a établi le thème du droit à l’alimentation : « Chaque homme, femme et enfant a le droit inaliénable d’avoir à manger. Et ils ne doivent pas souffrir de malnutrition. Afin de se développer pleinement, et de conserver ses facultés physiques et mentales. » En 1986, la Banque mondiale, en droite ligne, a placé l’individu comme élément central de cette définition. « 825 millions de personnes dans le monde souffrent de malnutrition, majoritairement en Afrique », reprend Bénédicte Schutz.

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Survie

Dès le 1er janvier 2019, la principauté sera membre, pour deux ans, du conseil de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO). « Dans sept pays partenaires, 20 à 60 % des enfants sont mal nourris. Dans les objectifs de développement durable prioritaires, nous avons pour objectif la faim zéro. C’est-à-dire, intensifier la lutte contre la malnutrition, insiste le directeur de la DCI. C’est un travail et un projet vaste. A cause des conflits mondiaux, la faim est de nouveau un sujet majeur. Nous espérons allouer au minimum 25 % de nos fonds sur les 3 années à venir. » Les populations qui se trouvent en insécurité alimentaire adoptent des stratégies de survie. Elles développent souvent des activités économiques, de petits commerces. Et, elles organisent des systèmes informels de solidarité afin de minimiser les risques. Ces populations font aussi souvent appel à l’épargne collective, au micro-crédit, et à l’échange de travail. Dans les PMA africains, les femmes commerçantes y ont souvent recours.

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Aide humanitaire d’urgence

L’aide au développement comprend aussi l’aide d’urgence. Mais, elle s’en distingue, en théorie. Car, elle devrait favoriser l’essor des populations aidées. Cependant, en général, l’aide d’urgence n’intervient que dans des situations de catastrophes naturelles ou conflits armés, en théorie. « Lorsque nous parlons d’aide humanitaire d’urgence, il faut penser aux conflits, et catastrophes naturelles. Nous avons alloué récemment une aide de 100 000 euros pour l’Indonésie », indique Bénédicte Schutz. Monaco est signataire des conventions de Genève, de 1949. Sur la période 2015-2017, la Principauté a alloué 1,765 millions d’euros d’aide humanitaire d’urgence, pour répondre à 35 appels d’urgence. « 2/3 de l’aide d’urgence passe par les agences des Nations Unies. C’est-à-dire, notamment, le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR). Il y a également l’Unicef, et 1/3 des aides passe par des structures civiles nationales, voire des ONG monégasques spécialisées », détaille Bénédicte Schutz. La DCI pourra également s’appuyer sur des grandes organisations internationales, comme l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), ou encore le Programme Alimentaire Mondial (PAM). « Les fonds alloués à l’aide d’urgence vont augmenter, pour atteindre 2,5 millions d’euros, sur 3 ans », ajoute le directeur de la DCI.

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Bénéficiaires directs

Pour 2018-2020, l’objectif de la DCI est donc d’aider plus d’un million de bénéficiaires directs. Pour la période 2015-2017, cette aide avait touché 800 000 personnes. Les pays ciblés ont été l’Afrique du Sud, le Burkina Faso, le Burundi, le Liban, Madagascar, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal et la Tunisie. « Avec l’aide aux bénéficiaires directs, vous devez associer un facteur exponentiel, qui sont les familles. C’est-à-dire, que des populations plus importantes sont concernées », explique Bénédicte Schutz. La DCI compte poursuivre sa collaboration avec le corps des sapeurs-pompiers monégasques. Ils œuvrent à la protection civile au Burkina Faso et en Mauritanie. « Le système de protection civile mauritanien est entièrement soutenu, grâce à cette opération. A Nouakchott, la majorité des ambulances sont estampillées Monaco, raconte Bénédicte Schutz. Idem, à Madagascar, au centre national de lutte contre le paludisme. Nous poursuivons, à Androhibe, Antananarivo, notre collaboration avec le ministère de la santé malgache et l’OMS. » En lien avec le CCTM, le projet Monaco Collectif Humanitaire (MCH), va se poursuivre. Un projet qui consiste à opérer à Monaco des enfants atteints de pathologies cardiaques difficiles. « Le CHPG, notre partenaire hospitalier, forme actuellement dix médecins à Monaco. Notre aide se tourne aussi vers les hôpitaux locaux, en cardiologie, orthopédie, et gynécologie. Et, les budgets devraient augmenter d’au moins 20 % à l’horizon 2020 », ajoute le directeur de la DCI. Le programme Volontaires Internationaux de Monaco (VIM) se poursuivra aussi, comme le confirme Bénédicte Schutz : « C’est un programme créé par la DCI en 2007. 39 VIM ont été recrutés. 15 sur la période dont 5 de Monaco. 69 % de femmes, et plus de 60 % des VIM sont issus du bassin d’emploi de Monaco. Et, 1/3 sont monégasques. » De 2015 à 2017, le festival de courts-métrages le Temps Presse, a sensibilisé 790 élèves aux ODD et 4 300 enfants dans les pays d’intervention. Pas question de se relâcher, rappelle Bénédicte Schutz : « Le 29 novembre 2018, en collaboration avec la direction de l’éducation nationale de la jeunesse et des sports (DENJS), le festival du cinéma solidaire aura lieu. L’objectif est de continuer à sensibiliser, les jeunes, à l’aide au développement. »