Edito n°1279 : Agir

Huit ans de travaux réunis dans une synthèse. C’est ce qu’a livré, lundi 20 mars 2023, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Sans surprise, le constat est très inquiétant. Néanmoins, ces experts soulignent que limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C reste un objectif possible à atteindre, à condition que chacun se décide à agir réellement et tout de suite. « La bombe à retardement climatique poursuit son compte à rebours, mais ce rapport est un guide pratique pour la désamorcer, un guide de survie pour l’humanité », a résumé le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, Antonio Guterres. Ce document a été adopté par les représentants des 195 pays membres du GIEC après une semaine de discussions à Interlaken (Suisse). Une fois de plus, le GIEC rappelle que ce sont les activités humaines qui sont la source du réchauffement climatique. Sur les dix dernières années, la température a augmenté d’environ 1,1 °C par rapport à la période 1850-1900. Une cadence jamais vue depuis au moins 2 000 ans disent ces experts. Le niveau de la mer a aussi été impacté, avec une hausse de 20 centimètres constatée entre 1901 et 2018. Le GIEC pointe aussi d’autres conséquences, comme l’augmentation du nombre de morts causée par des inondations, des sécheresses et des tempêtes, les difficultés d’accès à la nourriture et à l’eau, la disparition de centaines d’espèces, le développement de maladies, et la hausse des déplacements de populations. Face à cela, un certain nombre de mesures ont été décidées pour tenter de faire baisser les émissions de gaz à effet de serre. Mais « le rythme et l’ampleur des mesures prises jusqu’à présent, ainsi que les projets actuels, sont insuffisants pour s’attaquer au changement climatique », estime ce groupe d’experts. Au rythme actuel, nous atteindrons un réchauffement de 3,2 °C en 2 100. Il est donc nécessaire de se mobiliser immédiatement, martèle le GIEC, rappelant que pour limiter le réchauffement à + 1,5 °C, il faudra baisser de 48 % nos émissions de CO2 d’ici 2030, par rapport à 2019. Pour atteindre cet objectif, miser sur la technologie est une solution à prendre avec des pincettes, indique ce groupe d’experts : « L’innovation technologique peut entraîner des contreparties tels que des impacts environnementaux nouveaux et plus importants, des inégalités sociales, une dépendance excessive à l’égard de connaissances et fournisseurs étrangers […] et des effets de rebond. » Cet avis est partagé par un certain nombre de spécialistes, comme Françoise Berthoud, ingénieure de recherche au CNRS et directrice du groupement de service EcoInfo, qui assure aussi que la transition numérique ne permettra pas nécessairement la transition écologique [à ce sujet, lire l’interview de Françoise Berthoud : « La véritable sobriété numérique doit créer du changement social », publiée dans Monaco Hebdo n° 1270 — NDLR]. Si des politiques très volontaristes sont nécessaires, il faudra aussi faire de gros efforts autour du financement en faveur du climat. Le GIEC juge que les montants injectés devraient être entre trois et six fois plus élevés, pour espérer contenir le réchauffement à 2 °C ou 1,5 °C. Tout en rappelant, une fois encore, que ne rien faire coûtera au final encore plus cher que d’agir sans tarder.