Edito n°1244 : Gestation

Cette semaine, c’est un serpent de mer vieux de plus de 15 ans que la rédaction de Monaco Hebdo a choisi d’évoquer. Le projet de construction d’une nouvelle usine d’incinération en principauté est évoqué depuis le début des années 2000, et le moins que l’on puisse écrire, c’est que la gestation aura été longue et mouvementée. Longue sur le fond comme sur la forme, puisque ce projet aura nécessité du temps, des études, et des remises en question, aussi. Mouvementée, parce que des échanges, parfois vifs, entre les parties concernées ont émaillé ce dossier, décidément pas comme les autres. Ce sujet aura aussi été l’occasion de voir germer des propositions que l’on n’attendait pas forcément, comme la construction de cette usine en mer ou sous terre. Si ces deux idées n’ont pas été suivies, le fil rouge qui aura cristallisé les discussions, et généré pas mal de tensions aussi, c’est le choix de conserver, ou non, cette usine en principauté. Déléguer la gestion des déchets à la France permet de raser l’usine actuelle, et donc de récupérer 1 000 m2 de terrain, ont rappelé certains élus du Conseil national essentiellement entre 2012 et 2019. Raser l’usine actuelle, c’est aussi émettre moins de CO2, et atteindre ainsi plus facilement l’objectif fixé par le prince Albert II. Suite à la signature des accords de Paris, en 2015, Monaco s’est en effet engagé à baisser de 50 % ses émissions de gaz à effet de serre en 2030, par rapport à leur niveau de 1990, et à atteindre la neutralité carbone en 2050. Finalement, après quelques atermoiements, Monaco a décidé de garder cette usine sur son territoire, assurant vouloir ainsi conserver sa « souveraineté ». Des conseillers nationaux ont alors demandé au gouvernement monégasque de travailler sur un projet avant-gardiste, qui utilise de nouvelles technologies « vertes », afin d’éviter l’incinération en ville. L’objectif était alors de faire de la principauté un modèle sur ce sujet, afin que le fond et la forme soient en adéquation. Des contacts sont pris à l’international, et notamment au Japon. Mais cela n’aboutit pas. Quelques appels d’offres infructueux plus tard, le 22 novembre 2021, le gouvernement présente aux élus un projet. Baptisé « Symbiose », il a été imaginé en seulement quelques mois par les équipes de la Société monégasque d’assainissement (SMA) et de la Société monégasque de l’électricité et du gaz (SMEG). Il s’agit d’un centre de traitement et de valorisation des déchets (CTVD), qui transforme les déchets en énergie, de façon sécurisée et la moins polluante possible. La SMA estime que ce CTVD génèrera trois à quatre fois moins de CO2 et de 2 à 10 fois moins d’émissions polluantes. Les conseillers nationaux ont exprimé leur satisfaction, même s’ils n’ont pas été entendus sur l’ensemble de leurs attentes. « Nous ne sommes qu’à la moitié du chemin. Travaillons ensemble pour que l’autre moitié du chemin, c’est-à-dire la construction et la réalisation de cette usine qui n’existait pas auparavant à Monaco, soit réellement mise en valeur dans la structure de l’îlot Charles III », a commenté le président du Conseil national, Stéphane Valeri suite à cette annonce. Ce dossier a donc connu une forte accélération ces derniers mois, mais il est encore loin d’être totalement refermé.