Edito n°1198 : Temps

C’est un lieu différent des autres. Un lieu dans lequel l’idée du temps qui passe est presque abolie. Durement mis à l’épreuve depuis mars 2020 et le début de la pandémie de Covid-19, les services de réanimation ont assumé une lourde tâche. Confronté à des situations extrêmes, et parfois à la mort, le personnel médical a été soumis à un véritable marathon pendant près de 14 mois. La plupart du temps, il s’agissait de lutter contre l’hyper-inflammation provoquée par ce virus, ainsi que les dégâts, parfois sévères, sur les poumons et le cœur. Constamment mis sous tension, les services de réanimation ont donc fait face. Pour mieux comprendre comment, c’est une plongée au cœur du service de réanimation du centre hospitalier princesse Grace (CHPG) que vous propose Monaco Hebdo cette semaine. Nous avons interrogé Isabelle Rouquette-Vincenti, cheffe de service anesthésie-réanimation, et Sophie Albertini, cadre supérieure de santé au CHPG, afin qu’elles nous racontent leur année passée sous Covid. Lorsque la pression est montée de plusieurs crans, il a fallu s’adapter et trouver des solutions pour ouvrir davantage de lits de réanimation. C’est ce qui a été fait. Alors qu’habituellement le CHPG dispose de huit lits de réanimation et de quatre lits de soins continus, huit lits de soins continus Covid ont été ouverts, ainsi qu’une réanimation de cinq lits pour les autres malades de l’hôpital. Pour cela, le bloc orthopédique a été transformé en réanimation. En ajoutant les huit lits de réanimation dont dispose le centre cardio-thoracique de Monaco, la principauté n’a pas été débordée, malgré les vagues de contaminations, et de cas graves, qui se sont succédées pendant plus d’une année. Désireuse de tordre le cou à des croyances infondées, Isabelle Rouquette-Vincenti rappelle aussi qu’être admis en réanimation n’est pas synonyme de mort : « Dans un service de réanimation, il y a 30 % de décès, en moyenne. […] Pour les patients atteints de Covid-19 admis en réanimation, le taux de décès est de 10 à 13 %. Donc sur 10 malades qui rentrent chez nous, un décède. C’est toujours trop, évidemment. » Pour sauver toutes les vies possibles, un service de réanimation ne s’arrête bien sûr jamais. Les soins sont prodigués 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, par du personnel de santé plus nombreux que dans d’autres services, et spécifiquement formé à la médecine d’urgence. De jour comme de nuit, ce monde à part est toujours en mouvement, gommant ainsi, on l’a dit, la notion de temps. « Les soignants ne voient pas le temps passer. Par contre, pour les patients, le temps est long », souligne Isabelle Rouquette-Vincenti. Distordue, fragmentée ou étirée, la perception du temps est très différente dans un service de réanimation, et ce, quelle que soit la ou les pathologie(s) que l’on traite. Covid ou pas Covid.

Toute l’équipe de Monaco Hebdo marque une pause. Retrouvez Monaco Hebdo n°1199 en kiosques, chez votre marchand de journaux habituel, à partir du jeudi 9 juin 2021.